Quand une femme dit non, c’est non
Les réactions des personnes, beaucoup trop nombreuses qui, immédiatement, inconsidérément, dans un réflexe d’auto protection ont manifesté leur soutien à M. Dominique Strauss-Kahn, sont révélatrices de la prégnance du schéma archaïque selon lequel crimes et délits sexuels sont moins importants que le statut social et politique du présumé coupable.
C’est la preuve que l’ordre sexuel du système patriarcal et la domination masculine ont, de nos jours, encore une forte emprise sur notre société. Quant aux voix féministes qui, animées par l’exigence d’un traitement équitable de l’affaire, ont fait valoir l’exigence de la légitime prise en considération de la présumée victime, elles ont eu du mal à être prises en compte par les journalistes. Solidarité des puissant-es, solidarité des posssédant-es, solidarité de classe, solidarité de sexe qui gomment toutes chances pour celle qui n’est rien, qui n’a rien, qui fait le ménage … qui n’est qu’une femme, une femme immigrée ! Même si « il » est innocent, « elle » n’aura jamais la possibilité d’être présumée innocente, car déjà pour certain-es elle est présumée coupable. Lutte du pot de fer contre le pot de terre.
C’est pourquoi, nous pouvons craindre que demain le système judiciaire américain permette un accord entre les personnes. Ainsi, le crime de viol ou le déni de harcèlement sera une fois de plus banalisé par un dénouement où l’éthique et la justice auront fait place au troc, à la négociation, instance réglée à l’aune de l’argent.
Dans les années 1970, nous déclarions « Quand une femme dit NON, c’est NON ! et ce n’est pas oui ». Ce mot d’ordre de nos luttes féministes a conduit, en 1980, à une loi reconnaissant le viol comme crime. Cet acquis obtenu est à mettre au profit des luttes féministes solidaires de toutes les femmes ici et ailleurs de par le monde. 1981 à 2011 : 30 ans qui montrent que, face à des résistances coriaces, ces combats sont plus que jamais nécessaires. Le continuum des violences faites aux femmes dans le temps et dans les actes : 75000 femmes violées chaque année en France, d’innombrables harcèlements sexuels nous engagent plus que jamais à exiger la promulgation d’une loi cadre contre toutes les violences faites aux femmes.
Il n’est plus tolérable qu’au nom d’un prétendu pouvoir de classe et de sexe soient perpétrés, banalisés et souvent impunis ces crimes et ces délits ; il est absolument nécessaire de prendre en compte la juste mesure de la nature de ces violences qui bafouent l’égalité constitutionnelle entre les femmes et les hommes et sont contraires à toute émancipation humaine.
Paris, le 20 mai 2011.
Contact : monique.dental@orange.fr