Il y a 35 ans, le manifeste féministe contre le viol
Il y a 35 ans, le manifeste contre le viol
Parfois, en ce moment, on a l’impression d’être revenues 40 ans en arrière. Et quand on relit (voir ci-dessous), le texte et en particulier le dernier paragraphe du manifeste contre le viol lancé par le mouvement de libération des femmes en 1976, dont le slogan est : « Quand une femme dit non, c’est non », on a l’impression d’être en pleine actualité.
Quand on cherche sur internet ce texte on tombe sur tout un tas de choses, mais pas sur ce texte. Des soi-disant blagues et tous ces forums, où des garçons posent la question : est-ce que quand une femme dit oui, ça veut dire non ? …comme si on en était toujours là…
En clair, 35 ans après ce manifeste, lorsqu’une femme porte plainte pour viol, elle est toujours autant décrédibilisée, moquée, menacée. 99% des viols, malgré les gains en terme de loi de la lutte, restent impunis. On comprend donc que la lutte ne fait en fait, que commencer.
Le texte du manifeste de 1976
« Quand une femme dit non, ce n’est pas oui, c’est non! »
1) Le viol n’est pas une fable
C’est la réalité quotidienne des femmes dans la rue, dans leurs maisons, à leur travail, le jour, la nuit. Même quand nous échappons à la réalité multiforme du viol, nous n’échappons pas à la peur que nous avons apprise dès notre enfance et que notre expérience ne fait que renforcer.
2) Le viol n’est pas un hasard
C’est l’expression de la violence permanente faite aux femmes par une société patriarcale. Tout homme est un violeur en puissance. Nous sommes sans cesse en butte aux agressions sexuelles manifestes ou déguisées. La chasse aux femmes est ouverte toute l’année 24h/24h.
3) Le viol n’est pas puni en tant que crime contre les femmes
La loi dit : le viol est un crime. Dans les faits, il n’est jamais reconnu comme un crime contre une femme. Il est parfois reconnu comme un crime contre le propriétaire de la femme. L’accès des hommes au corps des femmes est pour chaque homme un droit qui n’est limité que par la propriété exercée par un autre homme sur une femme. La femme qui n’a pas de propriétaire est la propriété de tous.
4) Le viol n’est pas une loi de la nature.
Il est l’acte physique et culturel sur lequel est fondée la société patriarcale qui ne pouvait vivre sans l’appropriation et l’exploitation du corps des femmes, de leurs forces de production et de reproduction. Poussé par la nécessité de légitimer cette appropriation, le patriarcat a produit le mythe imbécile d’une sexualité masculine « irrépressible », « incontrôlable », « irrésistible », « urgentissime », en un mot, « virile ».
5) Le viol n’est ni un désir ni un plaisir pour les femmes
Quand une femme dit non, ce n’est pas oui, c’est non. L’impérialisme de la sexualité masculine chercher à se justifier en fabriquant une sexualité féminine passive, masochiste, entièrement soumise aux initiatives des hommes, ce qui permet de persuader tous les hommes (et même certaines d’entre nous) que le viol peut être « recherché », « provoqué », « consenti », et pourquoi pas, source de jouissance. Autrement dit qu’un viol n’est pas un viol.
6) Le viol n’est pas un destin
Nous en avons assez d’être violées et d’avoir peur de l’être. A droite comme à gauche, ils s’accordent pour justifier le viol. A droite, ils nous disent que le viol est le fait de psychopathes, d’immigrés, d’alcooliques, d’anormaux, d’obsédés sexuels. A gauche, ils nous disent que le viol est le résultat de la misère sexuelle et qu’il faut nous laisser violer au nom de la lutte contre le capital. Nous ne nous laissons plus culpabiliser, nous n’avons plus honte de dénoncer le viol et de lutter contre les violeurs. Nous refusons qu’une femme victime d’un viol soit transformée en accusée par la justice. Nous savons maintenant que la lutte contre la violence patriarcale est irréversible, que des femmes de plus en plus nombreuses commencent à chercher, à inventer des alternatives aux seuls modèles de relations que les hommes proposent : ceux du VIOL.