PPL Abolition en discussion au Sénat: Pour un texte de reconnaissance des violences faites aux femmes victimes de la prostitution
Communiqué de presse Abolition2012
PPL Abolition en discussion au Sénat: Pour un texte de reconnaissance des violences faites aux femmes victimes de la prostitution
Aujourd’hui et demain, le Sénat examine la proposition de loi relative à la lutte contre le système prostitutionnel. Les 60 associations du collectif Abolition 2012 souhaitent rappeler à l’ensemble des sénatrices et sénateurs les enjeux de ce projet de loi pour les droits des femmes.
Au lendemain de la réintroduction du délit de racolage passif par la Commission spéciale du Sénat, le collectif Abolition 2012 demande que la violence que constitue la prostitution pour les personnes prostituées soit enfin reconnue par les législatrices et les législateurs.
Le collectif Abolition 2012 et chacun de ses membres luttent depuis des années pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Engagé-e-s sur le terrain contre les violences faites aux femmes, nous voulons l’abolition du système prostitueur et réclamons :
1. La suppression / l’abrogation du délit de racolage passif. Cette condamnation est une double peine pour les personnes prostituées, car aux violences quotidiennes produites par le système de traite, les proxénètes et les clients prostitueurs, s’ajoute une condamnation de l’État
2. L’introduction de la pénalisation des clients prostitueurs. Pour lutter contre la prostitution et la marchandisation du corps des femmes, il est temps que la société responsabilise les clients prostitueurs qui imposent par l’argent des rapports sexuels non désirés.
3. Le déploiement de réels moyens pour permettre de réelles alternatives aux personnes prostituées avec un parcours complet et individualisé de sortie du système prostitueur et l’obtention de titres de séjours non conditionnés pour les personnes prostituées en situation irrégulière.
Paris, 30 mars 2015. Contacts Presse
Claire Serre-Combe
06 81873114
contact@osezlefeminisme.fr
http://abolition2012.fr/
Annexe
Pourquoi défendre la pénalisation des clients et l’accompagnement des personnes prostituées ?
1. La prostitution tue physiquement. Pour les chercheurs Hunter et Reed, les personnes prostituées sont « le groupe de femmes le plus violé de l’histoire de notre planète ». Aux Etats-Unis, l’espérance de vie d’une prostituée est estimée entre 42 et 30 ans. Le taux de mortalité des personnes en situation de prostitution est six fois plus élevé que celui du reste de la population.
2. La prostitution tue psychologiquement. De nombreux médecins comparent les violences psychiques dont sont victimes les prostituées à des traumatismes de guerre. Les personnes prostituées ont besoin souvent besoin de soin mais y accèdent difficilement (les troubles psychotraumatiques liés aux violences sexuelles et physiques ont un impact important sur la santé mentale et physique qui nécessite des soins spécifiques qui doivent leur être accessibles). Il leur faut des lieux pour être accueillies, écoutées, au besoin soignées, sans jugement.
3. La prostitution tue socialement. Les personnes prostituées ont des besoins urgents d’accompagnement dans le parcours de sortie de prostitution. Pour les personnes étrangères, victimes des réseaux de traite, cela commence par la régularisation. La proposition de loi de lutte contre le système prostitutionnel répond à des besoins essentiels, en développant des passerelles pour sortir de la prostitution et en coordonnant l’action des différents interlocuteurs.
4. La prostitution encourage la traite et l’esclavage. Devenus de respectables acteurs économiques dans certains pays, les proxénètes et « clients » prostitueurs fournissent et consomment des femmes en toute impunité.
5. La prostitution cumule les dominations : raciste, de classe et masculine. La quasi-totalité des « clients » de la prostitution sont des hommes (99%) ! Le droit des hommes à disposer du corps des femmes persiste dans le système prostitueur au nom d’un argument devenu caduque partout ailleurs : les besoins sexuels irrépressibles masculins.
6. La prostitution n’est pas un travail. En période de crise, des personnes de plus en plus nombreuses et de plus en plus jeunes sont vulnérables face aux exploiteurs sexuels. L’exploitation sexuelle ne peut être comparée à une activité professionnelle émancipatrice.
7. La prostitution n’est pas une libération sexuelle. La prostitution est la liberté pour les hommes d’acheter des femmes. Pour les personnes prostituées, on ne peut parler de liberté dans le sens ou la liberté sexuelle commence en dehors de toute nécessité et de toute forme de contrainte. Par ailleurs, la prostitution est un phénomène social, qui affecte les rapports femmes/hommes et la société dans son ensemble et demande donc une réponse politique.
8. La prostitution est contraire à la dignité humaine. Dire que tout s’achète et tout se vend revient à accepter que certains organisent ce commerce. Or, peut-on acheter et vendre l’accès au corps et au sexe d’autrui ? Pour nous, la réponse est non : ce serait légitimer un rapport de force, en l’occurrence marchand et machiste, dans la sexualité.
9. La prostitution est un obstacle à l’égalité femmes/hommes. Dans une société qui se targue de faire avancer l’égalité, la prostitution constitue un territoire d’exception, « épargné » par les exigences égalitaires des femmes. Les hommes y retrouvent le « temps d’avant » où ils disposent et du pouvoir sexuel et du pouvoir financier. En maintenant ce bastion inégalitaire, le système prostitueur nuit aux femmes, à toutes les femmes. Ce qu’achète le client prostitueur, c’est le droit d’échapper aux règles et aux responsabilités qui fondent la vie en société. Dans la prostitution, il trouve le dernier espace qui le protège du devoir de répondre de ses actes : un territoire d’exception où les violences et humiliations qu’il exerce sont frappées de nullité, au prétexte qu’il a payé. Et qu’il se montre « poli » ou non, il impose un acte sexuel au mépris du désir d’autrui. Ces hommes font « leur marché » dans un vivier de femmes touchées par la précarité, les violences, les proxénètes et les réseaux. Pourquoi sanctionner la demande ? Parce que les « clients » imposent un acte sexuel, ce qui serait, en toute autre occasion, sanctionné pour ce qu’il est: un viol.