Communiqué du Journal Féministe Algérien – Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes 25 novembre 2024

Communiqué du Journal Féministe Algérien – Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes 25 novembre 2024

En solidarité avec toutes les femmes victimes : Nous vous croyons, nous vous soutenons !

En ce 25 novembre, le Journal Féministe Algérien (JFA) élève une voix forte contre les violences faites aux femmes, ces violences qui ne se réduisent pas à des statistiques, mais qui s’incarnent dans des vies brisées, des droits bafoués et des luttes invisibilisées. Malgré les mesures législatives et les discours institutionnels souvent réduits à des promesses, les femmes continuent de faire face à des pratiques patriarcales enracinées qui cherchent à invalider leurs récits ou à leur imposer de prouver leur innocence.

Les violences sexistes et misogynes ne sont ni accidentelles, ni privées. Elles sont systémiques et relèvent d’un problème structurel. Nous refusons de tolérer les mesures formelles dépourvues d’application réelle, tout comme nous rejetons les discours de bois de part et d’autre qui transforment les engagements en simples outils de communication. Nous croyons les femmes victimes, et nous refusons de laisser les mécanismes sociaux ou judiciaires les isoler davantage.

Pour une lutte contre les violences faites aux femmes partout dans le monde, nous avons choisi un féminisme clair et sans concession : Nous refusons l’instrumentalisation :

Nous dénonçons fermement l’instrumentalisation des droits des femmes à des fins politiques, en particulier lorsque ces finalités contredisent les valeurs fondamentales de justice et d’égalité qui sous-tendent les luttes féministes. Qu’elle soit nationale ou internationale.

Cette instrumentalisation détourne la cause féministe de ses objectifs essentiels et la réduit à un outil servant des agendas éloignés des préoccupations réelles des femmes :

Les discours qui prétendent soutenir les droits des femmes tout en tolérant ou perpétuant des violences, qu’elles soient physiques, symboliques, coloniales ou structurelles, constituent une incohérence flagrante et une insulte aux victimes. Ils trahissent celles qui luttent pour leur dignité et vident les luttes féministes de leur sens.

À cet égard, nous condamnons particulièrement les agissements de l’écrivain Kamel Daoud, qui incarne une instrumentalisation des luttes féministes à des fins personnelles et idéologiques. Son comportement, aggravé par une condamnation pour violences conjugales avec usage d’une arme blanche, est illustré de manière accablante par son exploitation des traumatismes de Mme Saâda Arbane, survivante d’un massacre terroriste.

Non seulement il a exploité son histoire pour servir ses propres récits, mais sa propre épouse, psychiatre, a violé le secret médical en divulguant des informations confidentielles concernant cette survivante.

Ce double abus – l’exploitation d’un traumatisme et la violation de la déontologie médicale – est une atteinte grave à la dignité de Mme Arbane et reflète une absence totale d’éthique et de respect envers les victimes. Cette instrumentalisation personnelle et médiatique révèle une profonde hypocrisie : se présenter comme un défenseur des droits des femmes tout en participant activement à leur réification et à la banalisation de leurs souffrances.

De tels actes ne sont pas isolés ; ils s’inscrivent dans une dynamique où des figures publiques se revendiquent du féminisme tout en perpétuant des violences symboliques, sociales ou systémiques. Ces comportements affaiblissent les luttes féministes en les détournant de leurs objectifs et en les réduisant à des outils au service d’idéologies racistes, impérialistes ou patriarcales.

Il est impératif de dénoncer ces pratiques et de rappeler que les luttes féministes ne peuvent être utilisées comme des instruments pour justifier des agendas politiques ou personnels contraires aux principes de justice et d’égalité. Nous réaffirmons notre engagement à défendre les droits des femmes de manière sincère, éthique et sans compromis, en mettant au centre de notre action la parole, la dignité et les besoins des survivantes.

Dessin Daïffa Daïffa: Deux poids, Deux mesures

Des réformes législatives insuffisantes en Algérie le 30 Avril 2024 :

Les réformes législatives algériennes de 2024, bien qu’importantes, manquent profondément de cohérence. Si le durcissement des peines pour viol et attentat à la pudeur, ou encore la suppression de certaines clauses discriminatoires, représentent des progrès, ces mesures restent compromises par l’application de “La clause du pardon”, qui permet à des agresseurs d’échapper à la justice. Cette réalité transforme les lois en symboles vides de sens, incapables de répondre aux besoins des victimes.

Cependant, nous saluons avec satisfaction l’abolition de l’alinéa 01 de l’article 326, qui permettait auparavant à un kidnappeur de mineure d’échapper aux poursuites judiciaires en épousant sa victime. Cette avancée, attendue depuis longtemps, marque une étape essentielle dans la reconnaissance des droits des victimes et dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. Nous considérons ce progrès comme une victoire importante et une preuve que le changement est possible lorsque les voix féministes s’élèvent et se mobilisent.

Nous demandons cependant des réformes structurelles claires et applicables, notamment :

  • L’abolition totale des clauses permettant à des agresseurs de se dérober à leurs peines.
  • La mise en place de structures d’accueil adéquates et d’accompagnement intégrées (juridique, social, psychologique) pour les survivantes : la mise en place de guichets uniques pour la prise en charge des victimes dans toutes les wilayas du pays.
  • Des campagnes de sensibilisation massives et continues pour briser les normes discriminatoires à l’égard des femmes qui banalisent les violences.

Nous dénonçons également l’absence de soutien psychologique systématique aux victimes, alors même que des agresseurs peuvent bénéficier de telles mesures pendant leur incarcération. Cette injustice institutionnelle reflète un désengagement flagrant envers les survivantes.

Un soutien sans faille : “اللي يضرها يضرني

Nous rejoignons avec conviction la campagne lancée par nos camarades féministes algériennes, “اللي يضرها يضرني” (Ce qui lui fait mal, me fait mal), qui réaffirme que toute attaque contre une femme est une attaque contre la société dans son ensemble. Cette initiative incarne une solidarité collective face aux violences misogynes et un refus catégorique de leur banalisation en tant qu’affaires privées ou anecdotes isolées. Le privé ne doit plus être une prison qui réduit les femmes au silence et les isole dans leur souffrance.

Ensemble, nous briserons ces murs.

Nous adressons un message de solidarité à toutes les femmes survivantes :

  • Nous vous croyons.
  • Nous refusons de tolérer les pratiques qui vous forcent à prouver votre innocence ou à justifier votre souffrance.
  • Nous sommes à vos côtés pour dénoncer les violences systémiques, combattre les normes oppressives et faire valoir vos droits.

Cette lutte est collective et globale, et nous affirmons notre engagement aux côtés de toutes celles qui refusent de céder face à l’injustice et l’oppression.

Dessin Daïffa Daïffa: Exprime toi

Résister, c’est exister

Le Journal Féministe Algérien adresse un message de solidarité indéfectible à toutes les femmes qui luttent et résistent dans les contextes de violence extrême et de colonialisme :

  • À Gaza ou plutôt en Palestine occupée, où les femmes sont victimes d’un génocide silencieux, privées de leurs droits fondamentaux et confrontées à une violence coloniale dévastatrice.
  • Au Liban et au Moyen-Orient, où les guerres sionistes et impérialistes continuent de détruire des vies, tout en ciblant systématiquement les femmes et les enfants.
  • Au Soudan, où les femmes résistent au chaos d’un conflit qui exploite leurs corps comme armes de guerre.
  • En Afghanistan et en Iran, où les régimes autoritaires réduisent les femmes à un statut d’objets, effaçant leurs droits sous prétexte de traditions.
  • Au Sahara Occidental occupé, où les femmes sahraouies luttent contre l’oppression coloniale marocaine.
  • Et partout dans le monde où les femmes subissent les violences des guerres, du colonialisme et des régimes patriarcaux oppressifs.

Nous honorons leur résilience, leur courage et leur détermination face à des systèmes oppressifs qui cherchent à les réduire au silence. À toutes ces femmes, nous disons : votre lutte est la nôtre.

Dessin Daïffa Daïffa: Libération

Casser le silence, briser les murs :

Les violences misogynes ne relèvent ni de la sphère privée, ni d’une question marginale. Elles sont au cœur d’un système patriarcal que nous nous engageons à déconstruire. En tant que féministes, nous refusons les discours incohérents, les réformes superficielles et les mécanismes qui permettent à l’impunité de prospérer.

Notre combat est clair : briser les murs de l’isolement et des prisons symboliques que l’on impose aux femmes.

Nous lutterons pour que chaque survivante trouve une voix, un refuge et une justice qui ne l’abandonne pas.

Nous lutterons pour chaque victime, pour sa mémoire et pour qu’il y en ait pas une de plus !

Ce 25 novembre, nous réaffirmons que la lutte féministe est globale, intersectionnelle et radicale. Elle ne transige pas avec la justice, et elle refuse tout silence complice.

Pour les femmes.

Pour la justice.

Pour l’humanité.

Le Journal Féministe Algérien.

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